Présentez nous le Tour de France 2023.
Le Tour de France cette année va s’élancer du Pays Basque en Espagne, il n’y a eu qu’un précédent en 1992, c’était à Saint Sébastien. Là, on partira de Bilbao, c’est une première, et ce départ du Pays Basque va nous permettre d’aller très vite dans les Pyrénées et ensuite d’enchainer les 5 massifs montagneux français, ce qui est rare dans le Tour de France : d’abord les Pyrénées, ensuite le Massif Central, puis le Jura, puis les Alpes et les Vosges avec cette étape du Markstein à la veille de l’arrivée finale à Paris sur les champs Élysées.
Comment qualifierez-vous l’étape Belfort-Le Markstein ?
C’est une étape qui est conçue pour que tout puisse se passer. C’est une étape courte et dense avec sans arrêt des montées et des descentes qui commence par des lieux emblématiques du Tour de France puisque la première ascension sera celle du Ballon d’Alsace. C’est le premier sommet emblématique du Tour dès 1905, c’est-à-dire 3 années après l’existence du Tour de France.
Ensuite, on aura une succession de cols jusqu’à l’enchainement final qui est redoutable avec le Petit Ballon et le Platzerwasel.
C’est deux cols longs, il n’y a pas un mètre de plat entre les deux ascensions puisque quand on arrive au pied du Petit Ballon, on tourne immédiatement à gauche pour remonter et ensuite il y a le final, les dix derniers kilomètres pour aller jusqu’au Markstein. C’est un enchaînement qui a été décisif dans le Tour de France Femmes avec Zwift puisque c’est là où Annemiek van Vleuten, la Néerlandaise, s’est envolée vers la victoire d’étape et vers la victoire finale.
On aura ce final là au Markstein avec une ligne d’arrivée un peu différente. Mais tout sera possible, c’est une étape où il sera difficile pour une équipe de maitriser la course. Tout pourrait encore se jouer dans les Vosges. Depuis 15 ans on a souhaité avec Thierry Gouvenou, le directeur des compétitions, et Pierre-Yves Thouault, mon adjoint, faire en sorte que le Tour puisse évidemment se jouer dans les Alpes et les Pyrénées comme toujours, mais aussi dans d’autres massifs et notamment dans les Vosges. C’est ce que nous souhaitons montrer avec le Markstein qui nous offre une étape où tout pourra encore se passer, on rêve d’un dernier retournement de situation, d’un changement de maillot jaune pourquoi pas au dernier moment comme nous l’avons vécu en 2020 dans les Vosges avec le contre-la-montre de la Planche des Belles Filles. On rêve de revoir ça dans une étape en ligne qui se termine au Markstein.
À quoi peut-on s’attendre ?
On peut s’attendre à tout c’est-à-dire au meilleur. J’en reviens sur le contre-la-montre de la Planche des Belles Filles dans le massif des Vosges. C’est une étape qui est faite pour favoriser un changement de situation au dernier moment, par exemple un changement de maillot jaune. On a tous en mémoire Primoz Roglic et son casque de travers, la surprise énorme au dernier moment et la victoire de Pogacar. Là, c’est une étape en ligne, mais qui offre en quelque sorte les mêmes caractéristiques pour qu’un renversement de situation puisse avoir lieu. Avec cet enchaînement de sommets, j’évoquais le Ballon d’Alsace, mais il y a aussi le Petit Ballon, le Platzerwasel, le col de la Croix des Moinats, le col des Grosses Pierres, on est sur le plateau, sur la route des Crêtes dans un environnement magnifique. Donc tout peut se produire, c’est très difficile à maitriser pour une équipe.
Quelles sont vos favoris dans cette étape ?
On sera à la veille de l’arrivée finale donc de l’eau aura coulé sous les ponts, on sera en fin de Tour de France, les coureurs seront fatigués. J’imagine mal que nous n’ayons pas l’affiche du Tour de France 2023. Puisque l’affiche de ce tour c’est la revanche entre Vingegaard et Pogacar. Le Danois a remporté le dernier Tour de France contre Pogacar le surdoué du peloton qui avait gagné les deux éditions précédentes. Donc c’est le match retour, la revanche, entre les deux derniers vainqueurs du Tour de France, Pogacar 2 fois en 2020 et 2021 et Vingegaard en 2022.
Est-ce que ce match-là sera arbitré par d’autres coureurs ? Je pense à David Gaudu, le français qui avait fini 4e l’année dernière. Il avait été brillant sur Paris-Nice en début d’année, il avait même attaqué 2 fois « à la pédale » dans le col de la Couillole à la veille de l’arrivée de Paris-Nice. Est-ce qu’il pourra se mêler à ce combat ? Est-ce que d’autres coureurs pourront se mêler à ce combat ? On va voir sur le Tour le vainqueur du Tour d’Italie l’an passé, Jai Hindley l’Australien est-ce qu’il sera capable d’être là ? Est-ce que Enrik Mas l’Espagnol qui était en fin de l’année dernière, le rival le percutant de Pogacar en fin de saison sera là aussi ?
Est-ce qu’un Romain Bardet qui a terminé 2 fois deuxième en 2016 et 2017 pourra revenir à son meilleur niveau sur un terrain qu’il affectionne avec un seul contre-la-montre et en plus en côte. Et quand on est dans les Vosges on pense au Saônois, Thibaut Pinot, qui pour son dernier Tour de France, ne visera pas le classement général, mais il a très envie de donner encore des émotions aux gens. C’est une étape pas loin de chez lui qui devrait lui plaire où il voudra tout donner pour son dernier rendez-vous avec le Tour. C’est tout ce qu’on peut espérer, qu’il nous donne encore des émotions.
2024 fera de la France la terre d’accueil des Jeux olympiques, le Tour de France devra-t-il s’adapter ?
Le Tour de France s’adapte toujours, tous les quatre ans lorsqu’il y a les JO le Tour de France est avancé d’une semaine. La date « normale » du Tour de France c’est départ le premier samedi de juillet. Mais là, le départ se fait une semaine plus tôt que cela aurait dû être le cas sans les Jeux Olympiques à Paris.
Bien sûr que le Tour de France s’adapte puisque pour la première fois de son histoire depuis 1903 il ne se terminera pas à Paris mais à Nice. Puisque les forces de l’ordre, les forces de police et de gendarmeries qui sont indispensables au service de l’État et au Tour de France seront très largement sollicités en région parisienne. Donc, nous ne nous approcherons pas de la région parisienne et le final sera à Nice. Une ville que l’on connaît bien, les organisateurs du Tour de France depuis l’origine ont toujours voulu rapprocher la montagne de Paris mais on ne peut le faire. Ça sera le cas cette année après l’épreuve du Markstein il y a un transfert, les coureurs montent dans leur bus et se rapprochent de Paris pour la dernière étape. Là, la montagne sera là, Nice c’est la mer et la montagne donc tout sera à disposition. On a déjà dévoilé les deux dernières étapes avec justement une arrivée au col de la Couillole qui était une arrivée de Paris-Nice au mois de Mars. Et puis il y aura un dernier contre-la-montre qui sera absolument magnifique entre Monaco et Nice. On s’adapte mais j’ai envie de dire, on saisit l’occasion qui nous est proposée. La dernière étape à Paris est magnifique, on ne remplace pas Paris comme ça, mais c’est une parade des héros avec un sprint. Là, la décision pourra se faire jusqu’à la dernière seconde. La dernière fois qu’il y a eu un contre-la-montre le dernier jour du Tour c’était en 1989, c’est le fameux épisode de la légende du Tour entre Laurent Fignon et Greg LeMond et le retournement de situation à la dernière étape pour 8 secondes et LeMond qui bat Fignon !
Donc là aussi ça sera un final haletant avec du suspense jusqu’au bout. On ne remplace pas Paris comme ça, il nous fallait du prestige, quelque chose qui résonne dans le monde entier, puisque le Tour de France est retransmis dans 190 pays dans le monde, il fallait quelque chose qui parle à tout le monde. Nice, la côte d’Azur, Monaco ça parle à tout le monde, sur un terrain sportivement probant et avec un décor. C’est ce décor extraordinaire qui fait la force du Tour de France, qui existera entre Monaco et Nice, mais comme il existe en Alsace et dans les Vosges avec l’arrivée finale au Markstein.